Serres agricoles : des écrans thermiques pour économiser du chauffage

8 min de lecture Mis à jour le 24/01/2025
Mis à jour le 24/01/2025 8 min de lecture

Pour économiser de l’énergie dans les serres, rien de tel qu’une bonne isolation. Les écrans thermiques, installés en toiture des abris, complètent la démarche en renforçant l’efficacité énergétique des serres.

En France, 80 % des serres agricoles sont chauffées au gaz (CTIFL, 2022), une source d’énergie dont les prix peuvent considérablement fluctuer. Cette dépendance énergétique rend les producteurs vulnérables aux hausses soudaines des coûts. Par exemple, en 2022, le prix du gaz pour les entreprises a augmenté en moyenne de 67 % par rapport à 2021 (Statistiques développement durable). Face à cette flambée des coûts, certains maraîchers ont dû décaler leurs dates de plantation ou réduire le chauffage de leurs serres, avec les pertes de rendements que cela induit.  

Pour limiter les charges de l’exploitation agricole et son impact environnemental, une bonne maîtrise de l’énergie est indispensable. Une bonne isolation permet notamment de conserver un maximum de chaleur à l’intérieur de la structure et d’économiser du chauffage. Au-delà des matériaux choisis pour construire la serre, des outils supplémentaires peuvent en améliorer l’efficacité énergétique : c’est le cas des écrans thermiques.

Les écrans thermiques, c’est quoi ?

 

Déployés sous toute la surface du toit des serres, les écrans thermiques sont des toiles rétractables qui ont une fonction d’isolant et, pour certaines technologies, d’ombrage. 

La fonction des écrans thermiques est d’abord de réduire les pertes de chaleur la nuit et l’hiver, quand les températures extérieures chutent. La bonne isolation thermique est permise par une limitation des pertes de chaleur convectives, avec un écran bien fermé, et radiatives, grâce à des matériaux réfléchissants et à faible émissivité. 

L’été, l’ombrage permis par certains écrans limite l’augmentation de la température lors d’ensoleillement trop intense qui pénalise le développement des plantes et les rendements. 

Les écrans thermiques sont fréquemment utilisés en France, surtout en Bretagne, une région riche en serres chauffées. En 2021, au niveau national, 84 % de la surface de serres verre chauffées étaient équipées en écrans thermiques mobiles, et 4 % en écrans fixes. Les serres équipées d’un double écran représentaient presque 8,5 % du parc de serres verre (CTIFL).  

Des économies d’énergie significatives

 

L'utilisation d'écrans thermiques repliables, notamment utilisés la nuit, peut réduire la consommation énergétique de 20 à 25 % en serre hors-sol chauffée (tomate ou concombre) (CTIFL). De son côté, la région Centre affirme une économie d’énergie moyenne de l’ordre de 10 à 25 % sur l’ensemble de la période de culture.

Les écrans thermiques peuvent d’ailleurs être posés en double, voire en triple. Le CTIFL a aussi évalué une économie pouvant aller jusqu’à 37 % avec la pose d’un double écran thermique par rapport à une serre sans écran. En contrepartie, ces systèmes sont plus coûteux et difficiles à installer dans des serres trop basses.

Toutefois, il est difficile d’estimer la rentabilité de ces systèmes de manière générale, puisqu’elle dépend du coût du combustible utilisé pour le chauffage, de la fréquence d’utilisation, de la durée de vie de l’écran (8 ans en moyenne, mais c’est très variable) mais également de l’étanchéité de la serre. 

L’agriculteur ou l’agricultrice qui souhaiterait s’équiper doit donc bien se renseigner sur ses besoins et sur les possibilités techniques liées à son type de serre et à son budget.

Différents types d’écrans thermiques

 

Les écrans mobiles nécessitent un espace important disponible et donc une hauteur de serre importante. Ils sont donc en général plus adaptés aux serres modernes. Leur mécanisme de déploiement repose sur un pilotage automatique, grâce à des sondes de température. Ainsi, la gestion climatique de la serre est optimale

Pour les anciennes serres qui n’auraient pas suffisamment de hauteur, l’installation d’écrans fixes reste une possibilité. Leur système d’ouverture et fermeture est manuel. 

 

Serres modernes : allier écran thermique et ombrage

 

Les écrans thermiques combinés avec la fonction d’ombrage sont de plus en plus utilisés. Il s’agit généralement de toiles tissées de bandes de polyester et/ou d’aluminium. Le gradient d’ombrage peut donc dépendre de la quantité d’aluminium contenu. Ce matériau réfléchit les rayons du soleil vers l’extérieur sans piéger les infrarouges longs dans la serre, qui pourraient augmenter la température intérieure. Les écrans thermiques composés de polyester et d’aluminium sont donc un bon compromis entre l’ombrage et l’écran thermique. Un réglage fin de ces toiles permet de les adapter à toutes les périodes de l’année ou à des contextes climatiques en particulier. 

 

Serres anciennes : miser sur l’écran fixe

 

D’autres écrans thermiques sont composés de films plastiques en polyéthylène, E.V.A (polyéthylène vinyle acétate) ou polyester. Bien qu’ils soient efficaces, ils sont peu durables et augmentent le taux d’humidité. Ils sont donc plutôt recommandés pour les serres anciennes dans lesquelles seuls les écrans fixes peuvent être installés. Transparents, ces écrans sont installés l’hiver pour limiter les pertes de lumière. Dans les vieilles constructions qualifiées de “passoires thermiques”, l’économie d’énergie réalisée peut être importante. 

 

Avantages et inconvénients de différents écrans thermiques 

 

Avantages

Inconvénients

Ecrans thermiques simples 

Réduction des pertes de chaleur (20-25 %)
Plus économique (5 à 10 €/m2)
Pilotage automatique 

Peu adapté en cas de besoin d’ombrage

Ecrans thermiques multifonctionnels
(thermique + ombrage)

Combine l’isolation thermique et l’ombrage
Adapté l’hiver comme l’été
Réduit la surchauffe estivale
Pilotage automatique 

Coût plus élevé 

Ecrans thermiques double

Isolation thermique renforcée
Idéal pour les climats froids
Pilotage automatique 

Plus coûteux à l’installation que la version “simple”
Nécessite une serre haute 

Ecrans thermiques fixes

Moins cher qu’un écran motorisé
Facile à installer et adapté à des serres plus anciennes

Moins flexible pour répondre aux variations climatiques saisonnières 

 

Le coût des écrans au m2 est très variable selon la technologie et le distributeur. Il ne faut donc pas hésiter à contacter directement les distributeurs pour comparer les devis.  

Aides financières grâce aux certificats d’économies d’énergie

 

Des aides financières ont été mises en place pour encourager l’installation d’écrans thermiques. Ariane Grisey, ingénieure au CTIFL et présidente du groupe Agriculture au sein du club CEE (Certificats d'économies d'énergie) porté par l’ATEE (l’Association technique energie environnement), précise : « depuis l’été 2024, il existe des aides via le dispositif des CEE sur le simple écran. Déjà existante, la fiche AGRI-EQ-102 concernant le double écran a été revue en fin 2024 ».

 

Financement par les certificats d’économies d’énergie (ATEE CEE)

Type d’écran

Numéro de fiche

Part de l’investissement couverte par le forfait CEE

Montant en kWh cumac par m² de serre équipée

Double écran thermique 

AGRI-EQ-102

21 %

290 kWhcumac x m² de serre équipée

Écrans thermiques latéraux

AGRI-EQ-104

2 %

48 kWhcumac x m² de serre équipée

Simple écran thermique

AGRI-EQ-111

18,7%

360 kWhcumac x m² de serre équipée 

Les limites des écrans thermiques

 

Attention, ces systèmes doivent être utilisés dans les bonnes conditions afin de remplir leurs objectifs. Mal gérés, ils peuvent engendrer des pertes de rendement sans même apporter un véritable gain d’énergie. Il faut notamment éviter les variations thermiques brutales. Une ouverture trop rapide des écrans peut provoquer une chute soudaine de la température sur les plantes, et affecter leur développement en accentuant la condensation et donc les maladies fongiques. Le pilotage climatique est donc nécessaire pour éviter la condensation.

Par ailleurs, une serre bien isolée retient davantage la chaleur, mais en contrepartie, les taux d’hygrométrie augmentent, de même que les risques de maladies telles que le botrytis. Il peut être intéressant d’installer un système de déshumidification économe en énergie. Certains constructeurs vantent toutefois des écrans capables de gérer l’humidité en retenant la condensation du vitrage et en étant perméables à la vapeur d’eau, afin de protéger les plantes. 

Dans tous les cas, le choix d’un écran dépend de la région et de ses conditions climatiques, des cultures, et du budget du producteur.  

Impact sur l’environnement

 

Pour réduire leur impact sur l’environnement, il est important de choisir des écrans thermiques fabriqués à partir de matériaux de bonne qualité, qui résistent aux conditions environnementales (températures, humidité…) et tiennent dans le temps. Leur bon entretien prolonge également leur durée de vie. De plus en plus de constructeurs s’orientent vers des matériaux recyclables et à faible impact environnemental : les producteurs pourront se renseigner auprès des distributeurs.

Bien que les études sur l’impact environnemental des écrans thermiques soient encore limitées, une meilleure efficacité énergétique contribue à économiser de l’énergie (souvent fossile) et donc à réduire les émissions de gaz à effet de serre.  

Les pertes de chaleur dans les serres

 

La plupart des pertes de chaleur d’une serre se font par la toiture, puisque c’est la plus grande surface d’échange thermique avec l’extérieur. 

Les serres sont soumises à trois grands types de perte de chaleur : 

les pertes par convection, qui sont liées aux mouvements d’air. Dans une serre, l'air chaud à l'intérieur peut s'élever et être remplacé par de l'air plus froid entrant par des ouvertures, des trous ou des fissures.

les pertes par conduction : la chaleur est transférée à travers les matériaux solides, comme le plafond et les montants de la serre. Ces matériaux perdent de la chaleur au contact de l’air plus frais à l’extérieur.

les pertes par rayonnement (ou radiation) : elles proviennent de la dissipation d’infrarouges longs du sol et des plantes, à travers le matériel de couverture de la serre.  

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Serres agricoles

Sources

 

  • Région Centre - Le défi de l’énergie dans les serres

  • CTIFL - rapport d'impact 2022 

  • CTIFL - Enquête 2021 auprès des producteurs de tomate et de concombre sous serre sur l’utilisation de l’énergie.

  • FranceAgriMer

  • Statistiques Développement Durable 

  • Crédit photo : CTIFL